Pinocchio
C'est par ses mots que mon libraire, spécialisé dans la BD, m'a présenté cette étrange bande dessinée de Winshluss, librement inspirée de l'histoire originale de Pinocchio.
Un registre plus sombre, un ton adulte, un histoire déviante, cruelle et drôle, un conte passé au vitriol avec un indéniable talent, voilà ce qui vous attendra lorsque vous poserez les yeux sur cette BD.
Tout d'abord, il faut dire que c'est un bel objet. La couverture, avec ses reflets argentés sur les éléments métalliques, est vraiment belle. L'intérieur est encore plus surprenant. Winshluss intercale dans son histoire des petits apartés courts qui s'imbriquent parfaitement dans la trame de principale, chacun ayant son propre style, et son propre ton, et faisant souvent mouche.
Le dessin de l'histoire principale est faussement naïf, pour mieux, au détour d'une planche superbement détaillée, nous prendre par surprise et provoquer une émotion inattendue. Naïf et sale, aussi, collant donc très bien avec le ton cruel, acide et drôle de l'histoire.
"C'est muet comme du Tati: c'est muet, mais parfois non".
Le criquet est une blatte alcoolique qui trotte dans le crâne d'un Pinocchio de métal. Mais à part ce personnage, personne ne parle. Pas besoin: le dessin et sa mise en scène sont tellement expressifs qu'on ne manque pas de sens. Au contraire, il donne à certains instants une intensité appréciable, et juste ce qui faut de décalage pour que quelques situations provoquent des éclats de rire.
J'ai dévoré la moitié de l'album hier soir, et après la claque je j'y ai pris, je ne peux que trop vous conseiller d'y jeter un oeil.
Notez que ça fait un très joli cadeau, même pour un myope, l'album étant épais comme 4 BD classiques avec une couverture vraiment réussie et du papier qui sent bon l'imprimerie. Bref, vous n'avez aucune raison valable pour ne pas ourir cette bande dessinée et profiter du spectacle.
En y repensant bien, moi aussi, je risque de tirer la gueule s'il ne remporte rien à Angoulème.