Jump or Die !
Mais tu n'es pas un efféminé comme l'autre antipodien et tu maîtrises déjà les sports à la mode.
Alors je te propose une petite activité de plein air sympathique qui occupera avec bonheur un week-end en famille ou une asileCon : le saut en parachute. "Comment qu'on fait ?"
Première étape : le lieu
Hé oui le saut en parachute ça ne s'apprend pas n'importe où. Il faut du matériel et les professionnels qui vont avec. Un avion et son pilote, une piste de décollage, des moniteurs diplômés et un terrain où retomber sans rien casser. Ca s'appelle un centre de saut. Car dans le parachutisme, on est français et on en est fiers. Foin des termes anglais et des barbarismes des autres sports "fun'n'extrem". Ici on te parlera de "voile", de "griffe", de "sac harnais" ou de "réserve". Des termes clairs et précis.
Bref. Le centre de saut est surtout l'école agréée par la FFP où de gentils messieurs t'apprendront tout ce qu'il y a à savoir. On en trouve partout en France. cette carte te permettra de trouver la plus proche de chez toi. Les plus gros centres ont plusieurs écoles. Trois par exemple à Pujaut (Vaucluse) où j'ai moi-même été initié. Pour cette étape un simple téléphone suffit. Tu appelles et tu prends deux rendez-vous, un avec l'école pour ton saut et un avec ton médecin pour obtenir un certificat médical.
Deuxième étape : le choix de la formule
Il y a deux façons principales de faire son premier saut en parachute :
- le tandem
C'est le plus simple et le plus rapide. Tu enfiles une combinaison et un harnais. Mais au lieu d'avoir un parachute sur le dos, tu as un véritable parachutiste. C'est lui qui va tout faire. Toi tu n'auras qu'à hurler, admirer le paysage ou vomir. Mais bon comme vous n'êtes pas des québécois, passons directement à la vraie seule façon de faire son premier saut :
- le saut d'initiation PAC
Tu es avec ton parachute face à l'immensité du ciel. Largage à presque 4000m. Plus de 45 secondes de chute libre avant d'ouvrir toi-même ta voile. Et juste deux moniteurs pour te tenir la main et corriger ta position. Ca c'est pour les vrais de l-asile. Par contre ça te prendra la journée.
"La PAC ? Kezako ?"
La Progression Accompagnée en Chute. C'est la façon la plus moderne d'apprendre le saut en parachute. Elle comporte six sauts en autonomie accompagné d'un moniteur. A l'issue de ces six sauts, et à condition d'avoir le niveau, on obtient le brevet A qui permet de sauter seul mais dans le cadre d'une école agréée. Le saut d'initation est le premier de ces six sauts. Si tu deviens un mordu, c'est toujours ça d'économisé.
Troisième étape : la formation
Après un solide petit déjeuner, tu te présentes à l'aube au centre de saut. Et là c'est la première poussée d'adrénaline. Les types à qui tu vas confier ton unique et précieuse vie ont des têtes de hippies ! Mais qu'est-ce que c'est que ça ? T'es pas pour un stage jonglage et collage ! Heureusement tu te rends vite compte que tu as affaire à des vrais professionnels.
Le stage commence par la paperasse : certificat médical, décharge, licence, assurance et paiement des différents frais. Autant pour le grand air et le soleil, les cinq heures qui vont suivre seront studieuses. Car il va te falloir un minimum de théorie. Sur ces cinq heures, tu auras une heure voire deux de "quoi faire entre le décolage et l'atterissage" et quatre heures de "quoi faire en cas de pépins". Car le parachutisme est un sport dangereux. L'accident c'est au mieux six mois d'hôpital. Donc tu écoutes religieusement ton moniteur.
Un rappel des grands principes de l'aérodynamique et on rentre dans le vif du sujet : présentation d'un parachute et de son ouverture. Un parachute c'est un sac-harnais, une voile principale, une voile de réserve, plein de câbles et cordage et deux énormes poignées bien visibles sur le devant. Et non ces deux poignées ne servent pas à ouvrir le parachute. Au bas du sac-harnais un bout de tube PVC dépasse. C'est le sommet de l'extracteur : un mini parachute qui va sortir la voile principale de son logement. C'est sur lui qu'il te faudra tirer pour ouvrir ton parachute.
La théorie est simple : On sort de l'avion à 4000m. On maintient sa position de chute jusqu'à 1500m. On ouvre son parachute. On pilote sa voile jusqu'au sol.
Chacune de ces étapes va être expliquée en détails par ce gentil moniteur. Et ce avec moults exercices. Oui tu vas travailler ta position de chute à plat ventre sur un skateboard. Et la sortie de l'avion dans un véritable avion (mais au sol). Quelques leçons de géographie aussi afin que tu puisses repérer du ciel l'endroit où tu dois te poser.
Mais ce que ton moniteur va surtout t'apprendre c'est la Procédure de Sécurité. En gros : dés que quelque chose ne se passe pas exactement comme prévu, on largue la voile principale et on ouvre la voile de secours. Pour ça les deux poignées sur le devant du sac. D'abord la droite, ensuite la gauche. Et ça on te le répète toutes les 3 minutes pendant 4 heures.
Une fois la formation finie, tu vas pouvoir sauter. Enfin si le temps le permet. Car c'est un sport de plein-air. Il faut du beau temps et pas plus de 15 km/h de vent pour le n00b que tu es. Si les conditions ne sont pas favorables, il te faudra revenir.
Et finalement le grand saut
Ca y est. Il fait beau. C'est maintenant.
Tu t'équipes. D'abord la combinaison. Puis une radio qui permettra à un moniteur au sol de te guider lorsque tu seras sous voile. Ensuite le sac-harnais. Et pour finir un altimètre, des lunettes et un casque dont l'utilité te semble plus qu'obscure. L'avion se présente en bout de piste. Tes deux moniteurs sont prêts. Quand il faut y aller, faut y aller.
Déjà tu n'es pas seul. Six autres personnes sont prêtes à monter dans le même avion. Tu te hisses à bord et tu t'assoies entre tes deux moniteurs. Enfin contre tes moniteurs : à dix dans ce petit coucou, la place est comptée. La porte est refermée. L'avion prend de la vitesse et c'est le décollage. Jusque là ça va.
L'avion va mettre une bonne dizaine de minutes pour atteindre l'altitude de largage. Ca te laisse largement le temps de répéter encore une ou deux fois la procédure de sécurité et de repérer le terrain à travers les larges hublot. Et puis de t'étonner : tu te sens plutôt à l'aise. Pas de vertige, les trous d'air ne te font rien, pas d'appréhension particulière.
Le pilote annonce enfin qu'on est à la bonne altitude. La porte est ouverte, le vent s'engouffre dans l'appareil. Et là, ça ne va plus du tout... Tu passes d'un environement sûr et fermé à une frêle plateforme en équilibre à 4 kilomètre du sol. Ton ventre se noue, tes extrémités blanchissent et ta bouche s'assêche. Les premiers à sauter, des habitués, se mettent en place et disparaissent d'un coup. Tu fixes le vide hypnotisé.
Une tape sur ton épaule, un "mise en place" beuglé dans ton oreille : c'est à ton tour. Le mieux est encore de débrancher ton cerveau et de faire ce qu'on t'a expliqué sans réfléchir. Tu t'agenouilles devant la porte, les mains sur les genoux, le regard sur le bout de l'aile. "Quand tu veux". Tu pousses sur tes jambes.
Black-out.
5 secondes après tu te retrouves en position de chute. Le vent t'arrache le visage mais tu flottes. Enfin c'est l'impression que tu as car en réalité tu tombes à 180km/h. Tu te concentres sur ta position. Les bras OK, les jambes tendues, le buste relevé. Un coup d'oeil à l'altimètre. Tout va bien. Un moniteur te tient, l'autre tourne autour de toi et te corrige. Ha non il vient te pincer le nez. Quoi ? Tu es crispé. Normal non ? Coup d'oeil à l'altimètre. C'est quoi ce geste déjà ? Ha oui "ouverture". Ouverture ? Mais tu en es où ? Tu viens juste de regarder ton altimètre mais ton cerveau n'a rien enregistré. Tu tires sur l'extracteur, tu tends le bras et tu lâches. Rien. Toujours rien. Les sangles te cisaillent soudainement les jambes et tes moniteurs disparaissent. Tu remontes avec un grand bang. La voile s'est ouverte. Tu vérifies que tout va bien. Tout est calme et silencieux maintenant, tu peux enfin profiter du paysage.
"Si tu m'entends, bats des jambes." Hein qui te parle ? Ha oui la radio. Un moniteur au sol est là pour guider dans tes évolutions et te ramener vers le terrain. Un virage à droite, un tour complet sur la gauche. C'est facile. Tu profites de la descente en te rapprochant doucement de la zone d'atterrissage.
Le sol se rapproche quand même. Tu te mets face au vent et tu attends l'ordre de freiner la voile. Tu attends. Tu attends encore. L'herbe défile quand même assez vite sous toi. Tu as l'impression que tes pieds vont labourer le champ quand vient enfin le signal. Tu tires les poignées jusqu'à tes genoux et touches le sol en douceur. C'est comme descendre d'un escalator.
"Bienvenue au club". Félicitations. Tu l'as fait et tu n'as qu'une envie c'est de recommencer. Parce que là tu étais tellement concentré que tu n'as pas profité. Mais bon tu es heureux.
Enfin jusqu'à ce que tu te rendes compte qu'on t'a fait atterrir à un kilomètre du centre et que personne ne t'a expliqué comment porter facilement 30 mètres carrés de tissu et 50 mètres de cordage divers.
Compléments de l'article
Des vidéos de saut d'initiation
La fédération française de parachutisme
Une école parmi d'autres
C'est quoi ce titre ?