Dead Space
Malgré quelques petits bémols, Dead Space réussit son pari, à savoir nous faire peur, notamment grâce à une ambiance très réussie. Le jeu se déroule à bord de l'USG Ishimura, un gigantesque vaisseau minier chargé de récolter des ressources à travers l'espace. Mais depuis qu'il a établi une colonie de forage sur la planète Aegis 7, il n'a plus donné signe de vie. Vous arrivez donc à bord avec une petite équipe chargée de découvrir ce qui ne tourne pas rond. Vous, c'est-à-dire Isaac Clarke, ingénieur de son état. Oui, le héros n'est pas un militaire couillu mais un simple ingénieur, comme Gordon Freeman. Ce n'est d'ailleurs pas le seul point commun entre les deux personnages : Isaac est désespérément muet, et il possède un pouvoir télékinésique en guise gravity gun au rabais, qui lui servira évidemment à résoudre quelques puzzles basés sur la physique...
Ce n'est pas trahir un grand secret que de dévoiler que plus grand monde n'est vivant à bord, à cause d'une infection d'origine extraterrestre qui a transformé les humains en nécromorphes. Ces charmantes bestioles sont divisées en plusieurs familles toutes plus répugnantes les unes que les autres. Je ne vais pas les décrire en détail, mieux vaut découvrir chaque monstre par soi-même, mais ce bestiaire est assurément un des gros points forts de Dead Space. La particularité des nécromorphes, c'est qu'ils font fi des conventions avec un sacré culot : coupez-leur la tête, ils continuent d'avancer comme si de rien n'était ! Tranchez-leur les jambes, ou du moins les appendices qui font office de membres inférieurs, ils poursuivent sans relâche en se trainant à l'aide de leurs bras (ou choses assimilées).
Dead Space est assez gore, particulièrement lors des séquences de game over.
C'est là qu'intervient l'autre point fort du jeu : l'arsenal mis à disposition pour tailler en pièce cette menace. Les armes répondent aux doux noms de cutter plasma, trancheur, découpeur... Bref, vous l'aurez compris, elles sont orientées vers la coupe de bidoche. Elles sont vraiment originales et se révèlent particulièrement jouissives à utiliser : bonnes sensations de puissance, tirs secondaires dévastateurs, du tout bon. C'est un vrai régal de démembrer les nécromorphes. A côté de ça, on trouve aussi quelques armes plus classiques, comme un fusil d'assaut ou le bon vieux lance-flammes des familles. Au total, 7 armes différentes, c'est peu mais suffisant, d'autant que chacune peut-être améliorée au fil du jeu (capacité chargeur accrue, dégâts augmentés, temps de chargement réduit, etc.). L'armure peut l'être également. Enfin, Isaac dispose d'un pouvoir de stase, qui ralentit temporairement l'ennemi ciblé. Tout ça rend les combats bien fun, heureusement me direz-vous car ils sont tout de même au cœur du gameplay.
Mais Isaac ne passe pas pour autant l'intégralité de son temps à étriper des vilains pas dizaines. Quelques phases viennent nous sortir de cette boucherie routinière. Certaines, on l'a évoqué, nécessiteront de résoudre des puzzles en faisant usage de la télékinésie, parfois dans des zones sans gravité. Ça ne vole jamais très haut, mais ces séquences restent suffisamment rapides et rares pour ne pas être casse-couilles. Seule celle du dernier niveau, qui consiste à convoyer un colis sur des rails, finit par être un brin répétitive. D'autres passages autrement plus inspirés vous feront sortir dans des zones sans air. Avec le compte à rebours de la réserve d'oxygène qui s'égrène implacablement, le stress est plus que jamais au rendez-vous, puisqu'il faut agir dans l'urgence avant d'étouffer. Souvenez-vous de l'excellent passage dans les égouts de Resurrection of Evil.
L'inventaire et l'interface d'amélioration des armes.
Du stress, il y en a de toutes façons en permanence. Dead Space parvient à distiller une ambiance vraiment flippante, en grande partie grâce à une partie sonore très travaillée. Chuintements, hurlements et autres bruits bizarres mettent bien la pression, sans oublier la musique, du grand art. Les graphismes ne sont pas en reste, les monstres sont très réussis et les décors dégoulinent de sang et autres sécrétions non identifiées (et tant mieux). Les morts du protagoniste principal sont bien mises en scène et gores à souhait. Un petit bémol toutefois au niveau visuel : le jeu n'est pas vraiment beau. Attention, il n'est pas moche non plus, il est juste banal techniquement parlant. En fait, il n'est pas plus impressionnant que les autres jeux d'action spatiale tendance biomécanique, à savoir la trilogie à base d'id Tech 4 (Doom 3, Quake IV, Prey), qui date tout de même de 2004-2006. On sent les textures console, dommage que la version PC n'ait pas droit à un peu plus de finesse.
Tant qu'on est dans le chapitre des défauts, signalons le moteur physique à la rue, qui considère que tous les objets ont le poids d'une boîte d'allumettes même pas familiale. Résultat : quand vous marchez, il suffit que vous vous preniez les pieds dans un cadavre (et ça ne manque pas d'arriver) pour que les 80 kilos de viande valdinguent sur 15 mètres... C'est le genre de petit truc qui casse bien l'immersion. Dans le même registre, le level design recèle quelques incohérences. Deux niveaux vous feront revenir dans des lieux déjà visités (économie quand tu nous tiens...), et alors les portes et autres placards précédemment verrouillés seront cette fois miraculeusement débloqués. De nouvelles caisses remplies d'objets auront même fait leur apparition, comme c'est pratique ! Bon je chipote, globalement le level design est tout de même bien foutu, avec des environnements aussi variés qu'il est possible de le faire dans un vaisseau et des niveaux offrant une structure en hub, ce qui change agréablement de l'habituelle fuite en avant de A vers B.
Petite galerie de portraits.
Enfin, je voudrais conclure ce test en évoquant un peu le comportement des ennemis (sans aller jusqu'à employer le terme d'IA). Quand j'avais vu le jeu à Paris, un développeur m'avait juré que les nécromorphes pouvaient se déplacer librement en utilisant le système de ventilation de l'Ishimura. Et en effet, certains surgissent bien des bouches d'aération. Mais qu'on ne s'y trompe pas, ces apparitions sont entièrement scriptées. En recommençant un passage, vous trouverez systématiquement les mêmes monstres aux mêmes endroits et aux mêmes moments. Façon Doom 3 donc, alors que je m'attendais à un comportement façon Alien Vs Predator, où les aliens avaient vraiment une liberté de mouvement et donc une certaine imprévisibilité. Ce n'est pas forcément un défaut, ça permet de meilleurs effets de mise en scène, mais la rejouabilité en prend un coup. Dans certaines arènes, on vous signale même carrément que la menace est terminée. Mauvaise idée, ça fait immédiatement tomber la tension puisqu'on sait qu'on ne risque plus rien avant la zone suivante.
Mais cette liste de petits défauts ne doit pas vous empêcher de découvrir Dead Space. Elle est présente juste histoire d'être totalement objectif (si seulement c'est possible...), mais rassurez-vous, ils ne gâchent en rien le grand plaisir procuré par cette aventure. Le jeu est bourré de bonnes idées, comme l'inventaire holographique en temps réel (CNN style) ou l'absence d'interface, les indicateurs étant placés dans le dos de la combinaison du héros. Si vous n'êtes pas déjà accaparés par les nombreux hits de cette fin d'année, je vous conseille donc d'y consacrer un peu de temps (comptez une douzaine d'heures pour en venir à bout). Pour une fois qu'EA nous pond un jeu qui sort de l'ordinaire, entre 15 Sims et un énième FIFA, il serait dommage de passer à côté.
L'ambiance est bien là malgré des graphismes en demi-teinte.
Nos lecteurs en pensent :
groove_salad : "Depuis que j'ai mis une statue de nécromorphe dans mon salon, mes rencontres Meetic veulent absolument aller directement dans ma chambre, sans même prendre le temps de boire un verre !"
Gatling : "Depuis qu'elle joue à Dead Space, ma femme regarde mon monstrueux appendice buccal d'un oeil suspect. L'autre jour elle a demandé au quincailler s'il vendait des cutters plasma. J'ai peur..."
kaplan : "J'en ai les cheveux qui se dressent sur la tête."
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Compléments de l'article
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